À Paris, l'immobilier bascule vers un marché réservé aux plus solvables

En trois décennies, le visage du marché immobilier parisien s'est profondément transformé. Les transactions à prix « accessibles » ont quasiment disparu, laissant place à un marché dominé par des acquéreurs très aisés ou fortement patrimonialisés, selon les notaires du Grand Paris.
Une montée en gamme progressive mais radicale des prix parisiens
Longtemps marqué par une diversité de niveaux de prix, le marché des appartements à Paris s'est progressivement concentré sur les segments les plus élevés. Les ventes conclues à moins de 4 000 euros le mètre carré, encore largement majoritaires jusqu'au début des années 2000, ne représentent plus qu'une part marginale des transactions depuis près de vingt ans.
D'après les données des notaires du Grand Paris, sept tranches de prix ont été analysées, allant de moins de 2 000 euros par mètre carré à plus de 12 000 euros. Cette lecture met en évidence un basculement net vers le haut de gamme, au détriment des catégories dites intermédiaires.

Les segments supérieurs devenus largement dominants à Paris
Entre 2017 et 2021, les ventes conclues à plus de 10 000 euros le mètre carré ont représenté plus de 60 % des transactions parisiennes, avec un record atteint en 2020, année durant laquelle elles ont culminé à 89 %. À l'inverse, les logements vendus en dessous de 6 000 euros le mètre carré ont quasiment disparu du marché à partir de 2010.
Alors qu'ils représentaient encore 96 % des ventes en 1996, ces segments inférieurs sont tombés à 12 % en 2009, avant de s'effondrer à seulement 2 % des transactions en 2025. Cette évolution confirme la transformation de Paris en un marché à solvabilité élevée, principalement accessible aux ménages disposant d'un capital important ou d'un fort soutien patrimonial.
| Tranche de prix | Part des ventes à Paris (1996) | Part des ventes à Paris (2025) |
|---|---|---|
| Moins de 6 000 €/m² | 96 % | 2 % |
| Plus de 10 000 €/m² | Quasi inexistante | Majoritaire |
Une trajectoire similaire mais plus nuancée en Île-de-France
À l'échelle régionale, la dynamique est moins brutale qu'à Paris, mais elle reste marquée. Depuis une vingtaine d'années, les transactions supérieures à 6 000 euros le mètre carré représentent en moyenne la moitié des ventes en Île-de-France, alors qu'elles demeuraient marginales jusqu'au début des années 2000.
Avant 2003, ces tranches oscillaient entre 1 % et 13 % des transactions. Les ventes dépassant 10 000 euros le mètre carré, inexistantes avant 2002, ont connu une progression continue jusqu'en 2021, atteignant alors 31 % des ventes régionales. Bien qu'en recul depuis 2022, elles pèsent encore 15 % du marché en 2025.
Le segment « abordable » en recul durable
Les notaires observent parallèlement un effritement constant des transactions à moins de 4 000 euros le mètre carré. Ces ventes, qui représentaient plus de 80 % du marché francilien jusqu'au début des années 2000, ne constituent plus qu'environ 30 % des transactions depuis 2006.

Ce recul progressif du segment le plus accessible reflète les limites du pouvoir d'achat immobilier des ménages modestes. Malgré le soutien apporté pendant plusieurs années par des taux d'intérêt historiquement bas et par l'allongement des durées d'emprunt - au moins jusqu'en 2022 - la hausse structurelle des prix a progressivement restreint l'accès à la propriété.
Un marché porté par les acquéreurs les plus solides financièrement
Pour les notaires du Grand Paris, la progression du haut de gamme illustre l'influence croissante d'acheteurs disposant d'une capacité financière élevée. Ces profils ont largement profité de conditions de financement favorables entre 2015 et 2022 et continuent aujourd'hui d'animer un marché devenu plus sélectif.
Dans ce contexte, l'immobilier parisien et francilien s'oriente durablement vers un modèle où la solvabilité prime sur le nombre, accentuant les écarts d'accès à la propriété et redéfinissant les équilibres du marché résidentiel (source : notaires du Grand Paris).