Résidences secondaires : un levier fiscal devenu stratégique pour les communes
Autoriser une majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires a profondément modifié les finances locales. Dans certaines villes, cette surtaxe représente désormais une manne budgétaire majeure, au coeur de débats économiques et politiques de plus en plus vifs.

Une surtaxe devenue une source majeure de revenus pour les villes
Depuis plusieurs années, les communes situées en zones dites « tendues » disposent d'un outil fiscal puissant pour contenir la progression des résidences secondaires : la majoration de la taxe d'habitation. Près de 4 000 collectivités sont aujourd'hui éligibles à ce dispositif, selon la Direction générale des finances publiques, avec la possibilité d'appliquer une hausse comprise entre 5 % et 60 %.
En 2024, cette fiscalité spécifique a généré près de 4 milliards d'euros de recettes pour les communes françaises, dont environ 436 millions d'euros issus uniquement de la surtaxe. D'après une étude menée par la plateforme Green-Acres à partir des données fiscales locales, le montant moyen payé par un propriétaire de résidence secondaire atteint désormais 1 125 euros, contre environ 700 euros avant l'entrée en vigueur du dispositif.
Paris en tête malgré une faible proportion de résidences secondaires
Avec plus de 334 millions d'euros perçus en 2024, Paris domine largement le classement des communes ayant encaissé le plus de taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Un paradoxe apparent, alors que ces logements ne représentent que 9,8 % du parc immobilier parisien, soit un peu plus de 137 000 biens, selon l'Insee.
Ce niveau de recettes s'explique par la combinaison de plusieurs facteurs : une base fiscale élevée, une concentration importante de propriétaires internationaux, mais aussi un phénomène bien ancré consistant à conserver un pied-à-terre dans la capitale après un départ en région. Une stratégie patrimoniale qui alimente mécaniquement les finances municipales, sans pour autant enrayer la progression de l'endettement parisien, attendu autour de 10 milliards d'euros à l'horizon 2026.
Nice et Cannes, deux stratégies fiscales opposées sur la Côte d'Azur
Derrière Paris, deux villes azuréennes complètent le podium : Nice, avec 63,8 millions d'euros collectés, et Cannes, avec 44,2 millions d'euros. Pourtant, leur approche fiscale diffère radicalement. Nice a choisi d'appliquer la surtaxe maximale de 60 %, tandis que Cannes fait partie des rares communes à avoir maintenu un taux de majoration nul.
La position élevée de Cannes s'explique par un autre paramètre déterminant : près de 44,5 % de son parc immobilier est constitué de résidences secondaires, contre 13,8 % à Nice, selon l'Insee. À cela s'ajoute un niveau de taxe d'habitation parmi les plus élevés du classement, avec un coût moyen avoisinant 1 867 euros par logement.
| Ville | Recettes 2024 | Surtaxe appliquée | Part de résidences secondaires |
|---|---|---|---|
| Paris | 334 M€ | 60 % | 9,8 % |
| Nice | 63,8 M€ | 60 % | 13,8 % |
| Cannes | 44,2 M€ | 0 % | 44,5 % |
Un outil dissuasif aux effets économiques et politiques discutés
L'objectif affiché par les communes ayant opté pour la surtaxe maximale est clair : freiner la multiplication des résidences secondaires, dont le nombre a plus que doublé en trois décennies, passant d'environ 53 000 à 137 000 logements dans certaines grandes villes. Dans les faits, l'effet dissuasif reste limité, les propriétaires concernés disposant le plus souvent d'une capacité financière suffisante pour absorber la hausse.
Au-delà de l'enjeu budgétaire, cette fiscalité soulève également des questions démocratiques. Une partie significative des contribuables concernés ne réside pas à l'année dans les communes où ils sont taxés et n'y votent pas. Pourtant, leur présence contribue à l'activité économique locale, notamment dans les zones touristiques. Un équilibre délicat que les municipalités devront gérer à l'approche des élections municipales de mars 2026.