Désamour pour les livrets réglementés : un basculement historique vers l'assurance vie

Le paysage de l'épargne en France traverse une phase de mutation profonde suite à l'érosion des taux réglementés amorcée en février 2025. Face à des rendements devenus moins compétitifs, les ménages procèdent à des arbitrages massifs, délaissant les livrets liquides au profit de solutions de placement plus rémunératrices.
Une décollecte marquée pour les supports d'épargne classiques
Le reflux des capitaux sur les placements de court terme se confirme. Selon les dernières données publiées par la Caisse des Dépôts, le duo emblématique formé par le Livret A et le LDDS a affiché un solde négatif de 960 millions d'euros sur le seul mois de novembre. Ce désintérêt s'explique principalement par un rendement qui stagne à 1,7 % depuis le mois d'août, avec la perspective d'un nouvel ajustement à la baisse prévu pour février prochain.
Le Livret d'Épargne Populaire (LEP), malgré son statut de protection pour les revenus modestes, n'échappe pas à cette tendance. Bien que son encours global atteigne 80,9 milliards d'euros à la fin novembre, il a subi une fuite de 1,5 milliard d'euros entre janvier et octobre. Son taux, fixé à 2,7 % depuis l'été dernier, semble ne plus suffire à compenser l'attrait des nouvelles offres de marché.
| Type de placement | Taux actuel (fin 2025) | Encours total (milliards €) |
|---|---|---|
| Livret A & LDDS | 1,7 % | 600,8 |
| LEP | 2,7 % | 80,9 |
| Fonds en euros (moyenne) | ~2,5 % | - |
Le renouveau de l'assurance vie comme refuge de performance
Ce retrait massif des livrets réglementés profite directement à l'assurance vie. Philippe Crevel, à la tête du Cercle de l'Épargne, souligne que les versements pourraient atteindre le seuil symbolique des 50 milliards d'euros d'ici la fin de l'année. Les épargnants sont séduits par le fonds en euros qui combine garantie du capital et rendements supérieurs. En 2025, si la moyenne du marché devrait s'établir autour de 2,5 %, les contrats d'élite affichent des performances allant jusqu'à 3,60 %.
L'attractivité est d'autant plus forte que de nombreux acteurs du secteur proposent des politiques de taux "boostés" pour capter les liquidités sortantes des banques de détail. Cette stratégie permet aux investisseurs de bénéficier d'une fiscalité avantageuse sur le long terme tout en profitant d'une rémunération bien plus dynamique que celle du Livret A, dont la cote de popularité s'effrite depuis le mois d'août.
Les perspectives du marché financier pour le premier trimestre 2026
La hiérarchie des placements semble désormais stabilisée au profit des supports longs. Les ménages français, autrefois attachés à la disponibilité immédiate du Livret A, acceptent désormais de bloquer une partie de leurs économies pour contrer la baisse des taux courts. Le plafond du LEP, toujours limité à 22 822,54 euros, reste une niche spécifique, mais l'essentiel de la bataille pour l'épargne se joue désormais sur les supports capables d'offrir plus de 3 % de rendement brut.
Les professionnels du secteur anticipent que ce mouvement de vases communicants se poursuivra tant que l'écart de rémunération entre les fonds euros et les livrets réglementés restera supérieur à un point. La prudence reste toutefois de mise pour 2026, car les futures décisions de la Banque de France sur le calcul de l'usure et des taux d'épargne pourraient à nouveau rebattre les cartes du patrimoine des Français.